« Salamat pagi » Bali !

347 nautiques séparent la belle île de Flores à Bali. L’île  de beauté, la corse indonésienne, du moins celle des millions de personnes, surtout des touristes qui y transitent chaque année ; six millions en 2007 j’y reviendrai… A notre tour nous allons transiter par cette île coincée entre Lombok et Java et  quitter la désolée Lubuan Bajo et son authenticité. L’excellent briefing météo de notre complice Luc Trullemans (que dis-je ? notre ami Luc !) nous est parvenu par mail. Jean et Olivier Stul ont comme à l’habitude peaufiné le plan de vol. Et le parcours sera à la hauteur… Nous quittons Flores en survolant le parc national de Komodo… Ces terres sauvages vues du ciel confirment l’impression de fin de siècle ressentie la veille au contact des « dragons ». Un survol inouï laissant entrevoir ce que nous ne voyons pas du plancher des lézards. Le bleu azur, le bleu lapis-lazzuli, le bleu turquoise des eaux de la grande bleue. Des îles et des récifs coralliens qui dessinent des formes que notre imagination façonne. Tantôt un cœur bleu corail, tantôt une île en forme de raie Manta. Une heure six minutes de pur bonheur pour arriver à Bima sur Sumbawa island. Halte inoubliable. La piste d’atterrissage est coincée entre les énormes parcs à poissons des pêcheurs. Endroit surréaliste pour une halte imposée par un manque de carburant dans nos frêles machines volantes. Carburant que nous ne trouverons point dans cet aéroport... Une nouvelles-fois la débrouille fera des miracles. Pierre organise la manœuvre. Trouver une voiture pour aller en ville ; y remplir des bidons d’essence à la station, et ramener le tout à l’aéroport… Il faudra deux heures pour refueler… Deux heures d’attente », de rencontres. Bima est musulmane. Ses habitants aussi. Tandis que le chant du Mouezzine résonne bien au-delà de l’enceinte de l’aéroport, des étudiantes en parfaite tenue solennelle jettent un œil à notre étrange manège. Même regard mi-amusé, mi-inquisiteur des agents de sécurité des lieux qui nous voient repartir vers d’autres cieux. Il nous reste 246 nautiques et 2 heures 36 de vol pour atteindre l’aéroport international de Bali. Le « Ngurah Rai airport » de Denpasar. De là haut on ne compte plus les bateaux de pêche, les énormes filets qui flottent au large. Que dire de cet extraordinaire port en forme d’étoiles, près d’Alas. Des dizaines de maisons agencées en étoiles et semblant s’élancer dans l’océan. Nos ULM s’y attardent en élégants virages à 360 degrés pour le plaisir des yeux. Les nôtres mais aussi les pupilles de ceux qui d’en bas nous font de grands signes amicaux. Nos regards témoins de cette réalité écologique évidente. Plus on s’approche de Bali, plus les forêts sont rares, plus le béton a grappillé du terrain. Culture à gogo, villages de plus en plus grands pour devenir des villes aux rues infinies et nous conduire à Bali par la côte Ouest. A peine arrivé que nous embarquons à bord de la voiture de Lida Pet Soede. Lida est hollandaise et vit ici depuis quinze ans. Elle travaille pour le WWF à Bali. Elle nous emmène  au port où une myriade de bateaux reviennent de la pêche miraculeuse. La pêche au thon. «Savez-vous que le thon que vous dégustez dans vos assiettes vient en majeure partie de cette région ? » nous lance Lida.  « Pour endiguer la raréfaction de certaines espèces, le WWF y a fait un travail de fond ; Avec les industriels, avec les autorités. Objectif : réguler la pêche au thon et en faire bénéficier les collectivités locales. Encourager la consommation d’autres poissons comme le mahi-mahi ou le barracuda ». L’étape suivante nous mène sur la presqu’île de « Turtles island ». L’illustration de biens des maux dont souffre Bali. Jadis, les tortues géantes y gambadaient joyeusement dans les eaux. Les nids de tortues pullulaient sur le sable au pied des mangroves. Désormais seuls certains sanctuaires abritent avec soin ces « reines de mer ». Ici Comme partout ailleurs dans cette vaste cité balnéaire,  le ciment a gagné du territoire. En cinq ans ,l’urbanisme incontrôlé a englouti quarante milles hectares de terrains cultivables et de forêts. Les tortues, très prisées dans les assiettes des hindouistes (majoritaires à Bali), ont peu à peu disparues. Les œufs ont succombés au changement climatique e à l’augmentation de la température moyenne du sable…   Les eaux salées se sont immiscées subrepticement dans les cours d’eau intérieur détruisant le fragile écosystème des eaux douces. Quitte à parler de l’eau, l’or bleu y fait cruellement défaut . Les nappes phréatiques pillées par l’industrie du tourisme et de l’agriculture atteignent un seuil critique. Dans le même temps, la surpopulation de l’île ( 3,3 millions d’habitants pour une capacité évaluée à 2,4 millions) s’aggrave et les besoins augmentent... La belle Bali a mal et le cache. Derrière l’accueil inégalé de ses souriants résidents, derrière le luxe de ses suites cinq étoiles, derrière ses longues plages de sable doré. Bali fait l’autruche et vous souhaite la bienvenue : « Salamat Pagi » !