Vers Java : Tempête de soleil et colère noire

Cette journée devait être aussi belle que le soleil levant au large de Bali. D’abord la lumière céleste qui sous l’horizon illumine en faisceau les nuages de beau temps. Puis cette boule de feu rouge-orange s’élevant peu à peu sous nos yeux ébahis. Ce fut à cet égard le plus beau de nos briefings. Lever : 5 heures du matin, consignes de vol pour,  de l’aéroport international de Denpasar,  se rendre dans un minuscule aérodrome à une demi-heure de vol de là. La base « Letkol » de Pemuteran. C’est là que nous attend le guide qui doit nous mener dans le cratère du volcan Kawah Ijen. Plan de vol en bonne et due forme, la tour de Denpasar nous assure par écrit que sur cette piste de gravier, il n’y a pas de fréquence radio… Nous partirons vers l’inconnu de l’aventure au pied des volcans.

Cette journée devait être aussi belle que le soleil levant, elle sera aussi mouvementée qu’une violente tempête de mauvais vent…  Je fais équipe avec Pierrot et  la dernière photo que je peux vous proposer est celle de l’approche de la piste d’atterrissage de Letkol. Petite piste, non pas en gravier mais en « dur » et où l’on frôle les toits des maisons pour se poser.
 
La suite sans images c’est la colère, que dis-je la crise de nerf, du directeur de l’aérodrome  furieux de ne pas avoir été prévenu de notre arrivée par ses collègues de Denpasar. J’ai rarement vu un homme perdre à ce point les pédales : Visage haineux, vociférant à s’en couper le souffle. Notre calme et notre sang froid le déconcertant un peu plus chaque seconde. Il nous reproche de ne pas avoir utilisé sa fréquence radio. Nous lui présentons le document officiel attestant qu’il n’y a pas de fréquence… dialogue de sourd ou plutôt monologue de ce petit chef refusant de perdre la face devant ses subalternes… Les mots tombent : « je vous donne 10 minutes pour partir d’ici ».
Il faut sauver les meubles, ne pas laisser en rade notre guide Yudi qui avait a fait une très longue route pour nous rejoindre à Pemuteran et nous mener au volcan. La mort dans l’âme, pour la première-fois du périple et dans l’urgence, décision est prise de scinder le team. Par téléphone, à même la piste, Jean négocie dans l’urgence et dans un stress palpable un nouveau plan de vol vers la ville de Surabaya. Avec Olivier, Alexandre et pierre, ce sont donc quatre des sept pilotes qui redécolleront à la hâte. 118 nautiques, une heure trente de navigation improvisée dans une visibilité réduite par endroit à 1,4 kilomètres et où nuages et nuées de pollution atmosphérique se confondent. Chassé-croisé entre nos poids plume du ciel un 737 vers ce gigantesque aéroport (plus grand que Bruxelles-National) et où nos compères n’auront aucun mal à atterrir… comble du comble, les autorités aéroportuaires garent nos petits ULM sur un emplacement réservé… aux Boeing 737 ! Allez comprendre…  
 
Dernier hic. Il n’ ya pas de fuel à Surabaya. Une nouvelle-fois nos nourrices en plastique rétractable seront d’un précieux secours. 240 litres d’essence acheminés en voiture d’une pompe à essence vers le tarmac d’un aéroport international sous 36 degrés, vous imaginez cela chez nous ? L’aventure c’est l’aventure.
 
Pendant ce temps là Stul, Jean-Claude et moi-même faisons route  avec Yudi, vers l’île de Java. Quelques heures de conduite, le ferry pour joindre les deux îles et l’arrivée, quelque peu épuisés, à Banyuwangi. Nous nous lèverons durant la nuit pour escalader les pentes de ce volcan mythique. Et cette question : Nos lendemains seront-ils aussi beaux qu’un soleil levant au large de Bali?